Valborg s'était éveillée en ce lieu paisible qu'était ce manoir, et dans lequel désormais elle demeurait. Depuis son arrivé, elle avait eu le temps d'arpenter cette étrange et vaporeuse demeure, qui paraissait aussi familière qu'imaginaire. Entre ces murs ésotériques, la jeune femme se sentait sereine, aussi sereine qu'au temps où elle et sa famille vivait en paix, loin de tout. Si cette époque lui manquait encore aujourd'hui, elle avait trouvé en ce lieu une nouvelle maison, un endroit où il faisait bon vivre. Les années de calvaire parmi les gens de la ville étaient désormais loin derrière elle, bien que cela ne devait pas faire longtemps qu'elle avait été projeté dans ce monde. En vérité, l'albinos n'en avait pas la moindre idée. Cela faisait-il une semaine? Un mois? Un an? Le temps semblait s'écouler d'une manière très différente que ce qu'elle avait connu, et elle était bien incapable de le mesurer. C'était d'ailleurs selon elle d'une inutilité total en ce lieu, car il n'y avait aucune raison d'être à l'heure ou d'être en retard et aucune obligation ne l'obligeait à se presser.
Après s'être levée, Valborg enfila ses vastes vêtements ternes et légers, et sortit de sa chambre. Elle ne croisa pas âme qui vive dans les couloirs, ni dans ce qui semblait être des salles communes, peut être des salons. Elle décida donc de sortir dans le grand jardin, voulant profiter du temps radieux qui paraissait ne pas changer au fil des jours. C'était quelque chose d'assez remarquable et elle s'était même demandé si ce monde était pourvu de changements météorologiques.
Marchant les pieds nus dans l'herbe verte et chatoyante du jardin au mille couleurs et au contraste infini, l'albinos respirait à plein poumon, profitant de l'air pur et frais du matin. Autour d'elle était un vaste tableau de bosquets et de fleurs en tout genre, de toutes espèces. Il y avait tant de plantes différentes que l'on aurait pu se croire en un jardin botanique. Mais après tout, peut être que le propriétaire des lieux, s'il en existait réellement un, était un amoureux de la nature et des plantes. Cela n'était pas pour lui déplaire, et de loin. Elle arriva au pied d'un arbre fruitier qu'elle n'avait jamais vu auparavant, dans le monde où elle était née. Afin de décrocher l'un de ses fruits, elle du se mettre sur la pointe des pieds et sauta légèrement sur place. Entre ses mains, elle examina sa récolte. C'était un gros fruit d'une couleur légèrement violette et dont la forme rappelais une figue, sans pour autant que sa peau ne soit fripée. En vérité, celle-ci avait à sa surface des sortes de petites boules, plus foncées que le reste. Valborg hésita un peu, mais finit par le mettre dans sa bouche. Le goût était sucré et acide, mais la texture n'était pas juteuse, plutôt semblable à celle d'une banane. Chose étrange, il ne semblait ne pas y avoir de graines à l'intérieur. Une fois son en-cas plutôt plaisant terminé, la jeune femme s'assit contre le tronc de l'arbre à fruit dont elle ignorait le nom, et ferma les yeux. Elle commença à se concentrer sur sa respiration, inspirant et expirant profondément et de façon régulière, puis entra doucement en méditation.
Cela ne devait pas faire quelques minutes que Valborg méditait lorsqu'elle entendit quelque chose approcher. Elle ouvrit les yeux, curieuse de voir ce qui avait causé ces bruits de pas. Elle fut assez surprise de voir se tenir devant elle un être lumineux, qui avait la forme d'une jeune fille à la peau clair. Cependant, l'albinos sut qu'elle n'était pas humaine. Elle sourit en entendant ses excuses, hochant la tête.
-Ce n'est rien, ne t'excuses pas. Je me sens flattée d'avoir été prise pour une de ses magnifiques plantes! Elles sont merveilleuses n'est-ce pas?
Valborg marqua un silence, plongeant ses yeux clairs et pâles dans ceux de son interlocutrice.
-Enchanté, Luna. Je me nomme quant à moi Valborg, Valborg Hrafndottir. Je ne sais depuis combien de temps je me trouve ici, mais je n'avais encore croisé personne et cela me fait plaisir que tu sois la première que je rencontre. Mais je crains ne pas en savoir plus que toi... Les dieux devaient avoir une bonne raison de m'y envoyer, mais j'ignore encore leur volonté.